Du 2 au 6, puis du 23 au 27 novembre, Marie-Lys Polchlopek (plasticienne sonore) et Romain Gontier (ingénieur du son) ont effectué deux résidences à la Fabrique Sonore, autour de la pièce Burnout (écrite par Alexandra Badea et montée par les cies Yaena et Les Gosses).Accompagnés de Renaud et Michel, Marie et Romain ont travaillé sur une composition électroacoustique et son dispositif de diffusion pour la pièce : des parapluies sonores arborescents, dont les tiges se terminent par des haut-parleurs piezo-électriques, qui permettront à terme une multidiffusion d’environ 40 sources.
Karine Dedeurwaerder et Mavikana Badinga, metteuse en scène et comédienne de la pièce, se sont déplacées à la Villa Mais d’Ici pour constater la bonne avancée des travaux ; la sœur de Marie est également passée réaliser des enregistrements vocaux en studio, pour les besoins de la création sonore.
A propos de Burnout (L’Arche éditeur)
« Burnout part d’un discours politique sur la valeur du travail. Jouant sur l’effet de liste, le texte met en scène deux personnages qui se font rattraper par leur monomanie. Le Burnout est une forme de dépendance au travail qui peut mener à la mort suite au syndrome d’épuisement professionnel. Burnout est un compte-rendu des névroses de l’individu plongé dans une société de plus en plus centrée sur l’efficacité et la performance. Burnout est une rencontre entre un évaluateur de ressources humaines et une jeune cadre dynamique qui veut travailler plus pour gagner plus. Burnout est un matériau dramaturgique construit sur la répétition des slogans publicitaires et politiques, où le langage perd sa consistance, où tout est déstructuré jusqu’à l’épuisement. Burnout est un texte qui surprend l’impact dévastateur du politique sur l’intime. »
Intentions sonores (Marie-Lys Polchlopek)
« À la lecture de Burnout, j’ai tout de suite « entendu » la pièce.
Uniquement deux personnages composent la pièce : L’évaluateur et L’évaluée, cependant, une voix autre se distingue entre ses deux personnages. Celle-ci apparait et entre en conflit avec leur intériorité, avec celle du spectateur, avec l’espace scénique et le jeu des personnages. Cette voix est multiple et intrusive : parfois elle peut être perçue comme conscience intime des personnages, parfois comme mode opératoire d’évaluation de la performance, parfois comme voix off adressée au public.
La multiplication et l’intrusion d’une ou plusieurs voix dans l’espace scénique révèle l’un des caractères propres aux personnages que soulève la pièce : l’obsession; celle de la nécessité d’être rentable pour une entreprise, d’être performant sur son lieu de travail avec l’idée sous-jacente d’un accomplissement de soi par tout ce qui peut le prouver financièrement ou hiérarchiquement.
L’accumulation d’informations et de phrases, de rythmes et de voix offre tout de suite la place à une création sonore qui participera à tempérer la lourdeur du sujet dans lequel les personnages sont construits sur une idée d’épuisement physique et psychologique. Le travail du son est ici pensé comme une avalanche dont chaque temps se pèse, se quantifie. Il résonne avec le sujet tout en permettant les points de ruptures silencieux propices au glissement de l’insupportable vers l’intolérable.
Deux points de vue essentiels seront le fil rouge de cette création sonore : l’intérieur et l’extérieur. Un dispositif sonore sera engagé pour contraster au mieux ces deux axes décrit ci-dessous.
Point de vue intérieur : par le biais de plusieurs sources sonores positionnées dans le public, un grand nombre de voix seront diffusées et adressées à celui-ci. Ces voix seront les voix de l’intime, celles qui parlent à l’intérieur de chacun et qui poussent à faire des choix. Ces voix parfois ne seront pas toutes audibles et pourront être parasitées par d’autres sources voisines (toujours situées dans le public).
Point de vue extérieur : un unique haut-parleur positionné sur le plateau et diffusant une voix principale sera adressée aux comédiens. Cette voix sera celle qui existe autour des personnages et qui les poussent également à faire des choix. Elle interagira directement avec les comédiens et participera activement à sa définition comme troisième personnage possible.Il me semble important également de trouver une scénographie sonore par le
dispositif technique adaptée au sujet de la pièce. Plusieurs propositions sont en cours d’élaboration comme par exemple de petites membranes rondes (cf. cartes d’anniversaires qui diffusent une musique lorsque la carte s’ouvre) pourraient être suspendues au dessus du public et diffuseraient les voix ou encore certaines fréquences suggestives d’un Burn Out proche.
Pour m’accompagner à réaliser cette création la collaboration d’un ingénieur du son (Romain Gontier) pour assurer le bon déroulement technique lors des répétitions, des représentations mais aussi du travail préparatoire de création est impératif. La technique utilisée et le propos artistique que porte la création sonore se pensent communément en amont du travail de plateau. »